Quand Chéri et moi avons décidé que ça serait plutôt cool d'avoir un bébé, la première étape a été d'envisager l'arrêt de la contraception. Sans grande originalité, j'étais sous pilule depuis environ dix ans. Comme on était pas non plus à la minute près, j'ai profité d'un contrôle annuel chez ma gynéco pour évoquer l'idée.

Plusieurs mois rien que pour arrêter

Il faut quand même préciser que me voyant approcher de la trentaine, ma gynéco, prévoyante, me demandait tous les ans à chaque contrôle s'il y avait un projet de grossesse. Et devant ma réponse négative, jusque là, elle me précisait bien: "Si il y a projet de grossesse, appelez-moi avant d'arrêter la pilule, il y a des examens et des vitamines à prendre avant".

Moi qui pensais qu'il suffisait d'arrêter la pilule et d'attendre tranquillement que la nature fasse son travail... Ben non. Une grossesse, en fait, quand tu veux la prévoir, tu la prévois pas à moitié.

BREF.

Lorsque je lui ai parlé de mes projets, j'ai eu deux missions.

- vérifier que mes vaccins étaient à jour. Notamment la coqueluche. Ce qui a entraîné une nouvelle question: "Où ai-je bien pu ranger ce foutu carnet de santé sachant que je ne crois pas l'avoir ouvert depuis le collège???"

- commencer une cure de vitamines / compléments alimentaires. Celle-là:

Voici l'explication de ma gynéco : "On sait que la carence en certaines vitamines, comme l'acide folique peut provoquer des malformations. On sait aussi que beaucoup de femmes sont en carence et que la pilule a tendance à aggraver cela. Après, il y a aussi des grossesses qui se passent très bien sans ça, mais vu qu'on le sait, autant mettre toutes les chances de son côté."

C'est vrai qu'un petit cachet tous les jours, ça ne coûte pas grand-chose pour être tranquille. A part une dizaine d'euros par mois non remboursés et surtout, trois mois d'attente en plus. Parce que dans l'idéal, il faudrait laisser les vitamines faire effet avant que la fécondation n'ait lieu. Donc AVANT d'arrêter la pilule. Trois mois avant, comme ça, on est tranquille.

Je pensais faire un bébé programmé, mais pas à ce point.

Surtout quand on essaie quand même d'être un peu discret pour éviter que les gens nous disent avec des yeux brillants de curiosité "alooooooooooors? ça y est?" et qu'on évite donc d'ébruiter qu'on essaie d'avoir un bébé. Pas pratique quand la pharmacienne, dans une belle démonstration de commérage, nous demande: "C'est pour quand?" (ben oui, sur la boite, c'est écrit que c'est pour femme enceinte, pas pour femme-encore-sous-pilule-qui-sera-peut-être-enceinte-prochainement).

La vie sans pilule

Durant toute ma jeunesse, j'ai donc pris scrupuleusement ma pilule tous les soirs, bien éduquée que j'étais à l'importance de la rigueur dans ce domaine, soigneusement dressée à coup de "il suffit d'un oubli" et terrifiée à l'idée qu'un vomissement un peu trop précoce m'expose à ce drame de la grossesse non désirée.

Evidemment, l'envers de cette médaille est que j'étais plus ou moins consciemment persuadée que sans pilule, je serais immanquablement enceinte.

Ben non. Ca a tardé. Plusieurs mois. Au point de me dire parfois que j'avais été bien bête de me soumettre à tant de contrainte vu que de toutes façons, même sans, je n'étais pas enceinte. Débile, je sais.

Par contre, ce que j'avais oublié, c'est que la pilule, en plus de supprimer la fécondité, bride aussi soigneusement les caprices hormonaux. Pendant presque dix ans, je me suis habituée à des règles de deux jours, trois maximum, sans aucune douleur, à peine une migraine le jour d'avant lorsque j'étais un peu fatiguée. Et à considérer silencieusement comme des chochottes celles qui se trouvaient à l'article de la mort tous les mois.

Et puis, mon corps a retrouvé son rythme naturel. Et trois mois après l'arrêt de la pilule, le temps de bien se débarrasser de toutes les hormones artificielles accumulées, j'ai eu mes premières vraies règles depuis dix ans.

OH.

MON.

DIEU.

Je me suis retrouvée pliée en deux par les crampes, avec des élancements de douleurs jusque dans les cuisses, une migraine à se taper la tête contre les murs et les nausées qui vont avec.

PARDON. Pardon pour toutes ces années où je ne vous ai pas prises au sérieux. Je l'ai bien mérité. Punaise, c'est vrai, on douille.

Consolation: enceinte, les règles nous fichent un peu la paix. Sauf qu'histoire de bien me faire prendre conscience de la galère dans laquelle je m'embarque, la grossesse va se faire attendre et je n'ai pas fini d'être pliée en deux une fois par mois.

La redécouverte du préservatif

Ceci explique peut-être pourquoi, entre mes deux grossesses, j'ai refusé d'être remise sous pilule. Même si j'étais très pressée de lancer une nouvelle grossesse après l'échec de la première, l'obstétricienne m'a quand même conseillé d'attendre le retour de couches, autrement dit les premières règles, afin d'être sûre que le corps soit bien remis en route. Et donc de prendre une contraception pendant un mois. Mais pour moi, reprendre la pilule, c'était repartir sur un processus d'imprégnation d'hormones qui prendrait peut-être encore du temps à se défaire et donc retarderait la nouvelle grossesse. Oui, les fantasmes allaient bon train. Donc, elle m'a conseillé de revenir aux préservatifs.

Alors si vous suivez, je n'avais pas utilisé de préservatif depuis... minimum dix ans, autant que d'années de vie commune avec Chéri. Même pas peur: on a redécouvert l'objet. On avait oublié la variété de formes et de textures disponibles et on ne savait pas vraiment quoi prendre. On s'est retrouvé comme des gamins de seize ans à se demander comment ça se met, déjà, ce truc.

On s'y est repris à plusieurs fois. Parce qu'il ne voulait pas sortir de l'emballage. Parce qu'il ne voulait pas se dérouler. Parce qu'il remontait. On l'a regardé, retourné dans tous les sens pour voir si quelque chose nous échappait dans la conception de l'objet. Finalement, on l'avait tellement trituré dans tous les sens qu'on a fini par le jeter sans même l'avoir utilisé pour en reprendre un neuf, des fois que ça vienne de là.

Sauf qu'on avait oublié que les préservatifs sont lubrifiés. Et qu'on l'avait tripoté pendant dix minutes. On a mis dix autres minutes rien qu'à ouvrir l'emballage du suivant tellement nos mains glissaient.

Autant vous dire que le câlin qui a suivi, on l'avait bien mérité.

Et qu'on était ravi de pouvoir abandonner ces trucs dès que le retour de couches a été derrière nous.

"C'est décidé! Je me débarrasse de ma contraception."

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