J'ai toujours regardé avec curiosité ce petit logo au-dessus de certaines caisses de supermarché.

Par précaution, la plupart du temps, je n'utilise pas ces caisses. Ca évite à quelqu'un de prioritaire de devoir faire valoir ses droits.

Sauf que maintenant, ces droits sont les miens.

Alors soyons clairs. J'ai presque un an et demie de grossesse dans les pattes maintenant. Je fais mes courses toutes les semaines (sans compter les boutiques diverses et variées où on fait aussi la queue type banque, boulangerie, etc.). Je fais même attention à aller faire mes courses en semaine, en milieu d'après-midi, vu que j'ai un emploi du temps qui me le permet et que j'ai besoin de prendre un peu mon temps. En un an et demie, il n'y a eu que deux fois - oui, DEUX petites fois - où on m'a laissée passer devant. Je peux donc les raconter soigneusement.

La toute première fois (émotion...)

A Carrefour, un samedi après-midi (oui je sais je cherche) en décembre (encore pire!). J'étais enceinte de cinq mois, donc avec un ventre déjà visible. Et comme j'étais fatiguée, et qu'il faisait froid, j'avais attendu que Chéri soit disponible pour aller faire les courses. On savait qu'on allait galérer un peu, vu le moment choisi, mais on s'est dit tant pis on l'aura cherché. Heureusement, en ces périodes bondées, la caisse prioritaire est tout de même un peu moins prise d'assaut que les autres, donc, même si il y avait quand même deux personnes devant nous. On se pose, prêt à prendre notre mal en patience. Le couple devant nous, le genre jeune retraité (55-65 ans environ) se retourne et me demande:

"Vous êtes enceinte?
-Oui.
-Ah ben alors passez."
J'ai souri, toute genée et j'ai remercié.
"Non, non, c'est normal, c'est le jeu, on sait qu'on doit laisser passer quand on se met à cette caisse".

Et donc je passe. C'est là qu'en fin de file arrive un autre femme enceinte avec un plus gros ventre que le mien encore. Le deux personnes se mettent à rire.

"Bon ben passez aussi! Décidément, on a pas choisi le bon jour pour tenter cette caisse!"

Tout s'est passé dans la bonne humeur et la détente. Normal, quoi.

La deuxième fois (la surprise de ma vie...)

Je suis à Kiabi cette fois, enceinte d'environ quatre mois. Seule. J'étais justement venue acheter des vêtements de grossesse pour caser le bidon qui prenait de l'ampleur, en début d'après-midi et en semaine. Il y avait donc peu de monde et une seule caisse d'ouverte. Mais mal joué, quand j'en ai eu fini, trois ou quatre personnes attendaient à la caisse. Et pas de caisse prioritaire dans le magasin.

Pas de panique: la queue était tellement longue que je me retrouvais au niveau des premiers présentoirs à vêtements, sortes d'estrades d'une cinquantaine de centimètres de haut. Je me suis donc tout simplement assise entre deux piles de pull pour attendre mon tour.

Et là passe une vendeuse, qui devait probablement faire des mises en rayons ou s'occuper des cabines, bref: qui passait là par hasard. Elle m'appelle:

"Madame, venez! Je vais vous ouvrir une caisse!
- Oh c'est super gentil, ça!
- Ah j'ai vu votre bidon, madame!"

J'en étais toute émue encore une fois. J'ai même appelé Chéri pour lui raconter.

Mais bon, soyons honnête. La plupart du temps, c'est plutôt l'inverse qui se passe. Personne ne me laisse passer, même maintenant à sept mois où le ventre commence à laisser peu de doutes. Et comme je suis quelqu'un de poli, je n'aime pas trop demander, j'ai toujours l'impression d'abuser. Une fois, profitant du peu d'affluence, j'ai même demandé à une caissière comment il fallait faire.

"Interpellez la caissière, c'est plus simple. Parce que les gens ne vous laisseront pas passer. Surtout les personnes âgées. Et ayez un justificatif sur vous. Elles, elles en ont et elles n'hésitent pas à le sortir. J'ai déjà vu de grosses disputes pour savoir qui était plus prioritaire que qui et devait passer en premier..."

Voilà qui donne envie. Alors les personnes âgées, curieusement, je n'ai jamais eu à m'en plaindre. Mais entre les clients qui se pensent très importants ou les caissières juste pas très délicates, j'ai eu mon lot.

Le coup de la carte fidélité

Dans une parfumerie en décembre (oui, je sais, c'était risqué, mais franchement j'ai été cool et j'ai embêté personne). Bon, déjà, il n'y a pas de caisse prioritaire et un monde fou, donc on patiente, c'est le jeu. Mais lorsque je suis enfin devant la caissière, que je vais pour payer, et qu'elle voit bien que j'ai un ventre énorme et que je peine à me tenir debout, il y a des pratiques commerciales un peu déplacées, du genre:

"Vous avez la carte du magasin?
- Non.
- Vous la voulez? Elle est gratuite.
- Non, merci.
- Parce qu'elles vous apporte plusieurs avantages et notamment des réductions sur bla bla bla...
- Bon, donnez-la-moi alors.
- Alors il me faudrait votre nom.
- Mélu.
- Votre adresse? Vous pouvez me l'épeler s'il vous plait..."

Comment espérez-vous que je reste polie?

Et encore, c'était une parfumerie en période de Noël, je peux comprendre. Mais en grande surface, quand j'arrive justement à la caisse prioritaire et qu'il n'y a qu'une personne avec un seul article devant moi et que ce monsieur est justement en train de payer son article, on se dit que ça devrait aller vite et donc, que tout va bien. Et bien non. Imaginez moi, avec tous mes articles DEJA posés sur le tapis, mon gros ventre, et la caissière (de la caisse prioritaire donc) qui se lance avec le client précédent (qui a DEJA payé) dans le dialogue suivant:

"Vous avez la carte du magasin?
- Non.
- Vous la voulez? Elle est gratuite et vous cumulez des bons d'achat...
- Ah ben oui, je veux bien alors.
- Alors vous remplissez ce formulaire.
- Ah zut, j'ai pas mes lunettes. Ben tant pis, je la prendrai la prochaine fois...
- Pas de problème, je vais le remplir pour vous. Alors donnez-moi votre nom? Ca s'écrit comment?"

Et pendant que la caissière interroge longuement le monsieur de devant au lieu de le laisser partir, la femme enceinte attend, debout, alors qu'il n'y a PERSONNE qui paye.

Le caddie abandonné

Peut-être faites-vous partie de ces gens un peu étourdis qui prennent leur place dans la file d'attente et qui, profitant du moment d'attente, se rendent subitement compte qu'ils ont oublié quelque chose à l'autre bout du magasin. Et vont le chercher, abandonnant là leur caddie pour bien signifier qu'ils vont revenir et que donc, ils sont en train de faire la queue tout en finissant leur course.

Déjà, à la base, ce genre d'attitude me déplaît et montre un mépris affiché pour tous les autres clients en leur demandant implicitement de surveiller sa place parce qu'on est plus pressé, plus occupé (et plus malin) qu'eux.

Mais pitié, s'il vous arrive de le faire, ne le faites pas à une caisse prioritaire! Le principe est justement de céder sa place à ceux qui sont plus pressés que soi pour raison médicale. C'est encore plus insultant.

Et comme je n'aime pas doubler bêtement, je suis restée un petit moment derrière ce caddie abandonné, alors que le tapis de la caisse était vide et que je me demandais si la personne qui l'avait laissé là n'était pas encore plus prioritaire que moi.

Donc non. On ne fait pas ça.

La caissière pressée

Les clients sont tous des gens pressés. Je lutte depuis des années contre ces gens qui viennent se coller à moi pendant que je compose mon code de carte bancaire histoire de rester dans les starting blocks dès que la caissière saisira enfin leur premier article. J'estime que c'est mon droit (et une question de sécurité) de prendre le temps de ranger ma carte bancaire, mon chéquier, mon portefeuille avant de repartir sur le parking. Mauvaise, je bloque parfois tout simplement la caisse avec le caddie pour empêcher les gens d'avancer trop. Chacun son tour et c'est le mien, jusqu'à ce que j'ai fini. Dix secondes de patience et de respect n'ont jamais tué personne.

Mais quand la caissière elle-même rentre dans ce jeu-là, je ne sais plus quoi faire. Enceinte, on est quand même un peu encombrée et on avance et bouge moins vite que d'habitude, forcément. Celle qui m'énerve le plus c'est celle qui:

- commence à scanner mes articles alors que la cliente devant moi est encore en train de ranger les siens (et que j'attends donc qu'elle ait fini parce que c'est SON tour et que j'ai bien dix secondes devant moi).
- jette carrément mes aliments (notamment les surgelés, donc tous mouillés) sur les articles textiles que la dame est en train d'essayer de ranger.
- laisse les articles s'entasser juste à la sortie de son tapis alors que je suis à l'autre bout de la caisse et que je ne peux pas me pencher pour aller les attraper. C'est pas de la mauvaise volonté, c'est physique, ya un obstacle.
- me jette mon ticket de caisse sur le tapis (c'est rare, la plupart me les donne en main propre, c'est pour ça que ça m'a surprise) et commence à encaisser le client suivant alors que je rampe sur le tapis pour ramasser ledit ticket là-bas à côté d'elle (et des articles qui ne sont pas à moi, du coup).

Là, vraiment, je l'ai mauvaise. Et je m'émeus devant la gentille caissière qui prend le temps de surveiller que j'arrive à faire passer les grosses bouteilles du tapis au caddie et qui attend que j'ai tout remballé avant de me dire au revoir et de passer au client suivant. Elle, je l'aime d'amour.

Du coup, j'ai développé une grande affection pour les courses Drive. C'est bien plus simple.

"Je suis pas censée être prioritaire à la caisse?"

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